Tout (ou presque) sur les paillis
L’automne, c’est la saison idéale pour les plantations, mais aussi pour valoriser les feuilles mortes en les intégrant au compost car c’est une excellente matière carbonnée ! Elles serviront aussi de paillage pour couvrir les parcelles de culture ou le pied des arbustes. Un déchet organique que l’on trouve en abondance à cette saison et qui permet d’imiter la nature, elle qui a horreur des sols nus.
Il n’existe que 3 types de sols sans végétation apparente visible : les déserts de sable, les déserts de glace et les terres cultivées de façon conventionnelles et intensives. Laisser trop longtemps un sol à nu (= “la terre à l’air libre” après la récolte), c’est le soumettre à toutes les formes d’érosions et priver de nourriture tous les éléments vivants du sol. C’est le transformer en désert…
Paillis, paillage et mulch…
une question de sémantique !
Le paillage est l’action de déposer le paillis. Toutefois, “paillis” est un terme ancien et aujourd’hui, on utilise plus volontiers “paillage” que “paillis” pour désigner la litière formée. L’inconvénient majeur de ces deux termes réside dans le fait qu’ils font souvent et uniquement penser à la paille, alors qu’il existe une multitude de techniques pour recouvrir son sol.
“Mulch” est un terme anglais, synonyme de “paillis”.
Ces 3 termes décrivent une même réalité : les couvertures qu’apportent les jardiniers sur le sol.
Quels matériaux utiliser en paillage ?
Le sol pouvant être considéré comme un super-organisme vivant, il convient de bien le nourrir. Comme tout bon régime alimentaire, il faut de la diversité ! Les paillages doivent être variés, de manière à apporter à la vie du sol la matière organique et les différents nutriments dont elle a besoin. Selon sa nature, un matériau destiné au paillage peut être à dominante azotée ou plutôt carbonnée (ça ne vous rappelle rien ? Le compostage bien sûr !), légèrement acidifiant ou neutre. Il faut veiller à alterner les ressources pour prévenir d’éventuelles carences.
Petit rappel des différences entre matière azotée et carbonnée :
Les matières organiques à dominante azotée apportent des nutriments facilement assimilables et dynamisent la vie bactérienne du sol. Leur dégradation est rapide, on doit donc les renouveler plusieurs fois au cours d’une saison estivale.
Pour les identifier facilement : elles sont vertes et humides
Exemples : orties, consoude, tontes de gazon (max 5cm d’épaisseur pour éviter la fermentation), restes de cuisine, adventices (sauf si elles sont montées en graines !!), algues…
Les matières organiques à dominante carbonnée se dégradent plus lentement et favorisent la création d’humus. Elles sont disponibles en plus grande quantité que les matières azotées et sont souvent utilisées pour le paillage d’hiver.
Pour les identifier facilement : elles sont marrons et sèches.
Exemples : paille, foin, graminées (type miscanthus), chanvre, feuilles de bambous, copeaux de bois et sciures, feuilles mortes, cartons, (exempts d’encre et de scotch), laine de mouton…
Les matériaux les plus équilibrés entre azote et carbone sont le fumier, les déchets de culture (tiges, feuilles, fanes…), le BRF frais (jeunes rameaux d’arbres feuillus), tailles de haie fraiches, fougères fraiches, feuilles de rhubarbe, maïs/ tournesols/ fèves (et les résidus d’engrais verts), roseaux…
Les avantages des paillages
Protection du sol contre l’érosion (phénomène lié à l'amincissement de la couche arable d’un sol sous l'effet des forces érosives naturelles de l'eau et du vent), le lessivage (phénomène qui correspond au transport des éléments du sol par les eaux de pluie ou d’arrosage, de la surface vers la profondeur) et la lixiviation (désigne la perte de nutriments végétaux hydrosolubles du sol, qui sont dissous et entraînés par les eaux d'infiltration à la suite de pluie ou d'irrigation).
Protection du sol contre les rayons du soleil qui en stérilisent les premiers centimètres.
Protection du sol contre la battance, le tassement et la compaction : le sol reste souple, meuble et perméable ce qui diminue les interventions humaines de binage ou de sarclage par exemple.
Régulation de la température : le sol est moins chaud le jour et plus chaud la nuit, ce qui est bénéfique pour la vie microbienne.
Diminution de l’évaporation : en le protégeant du vent et du soleil, les paillage ralentissent l’évaporation de l’eau du sol, ce qui diminue ainsi les besoins arrosage.
Compostage en place : la dégradation des paillages apporte des nutriments et de la matière organique au sol.
Moins de désherbage : en privant le sol de lumière, les paillages entravent la germinations des adventices, ce qui permet de diminuer considérablement le désherbage.
Vie du sol : le paillage améliore les conditions de vie de faune et de la flore du sol
Lumière : la couleur claire de certains paillages réfléchit une partie du rayonnement lumineux au bénéfice des cultures.
Chaleur : la couleur sombre de certains paillages capte la chaleur du soleil et l’emmagasine au bénéfice des cultures.
Vitesse de croissance : appliqués sous les arbres fruitiers, les paillages augmentent sensiblement leur vitesse de croissance en leur évitant la concurrence de l’herbe.
Les paillages ne sont pas magiques ! Quelques points d’attention sont donc à retenir :
Ils n’empêchent pas totalement la présence d’adventices mais limitent la germination des indésirables annuelles et facilitent l’extirpation des vivaces. Pour un désherbage complet, il faut opter pour des paillages synthétiques type films plastiques et bâches tissées que l’on laissera en place une saison complète (voire plus !).
De plus, ils freinent l’évaporation de l’eau mais cela ne signifie pas qu’il ne faudra plus arroser.
À la différence d’un amendement, les paillages sont des apports de matière en surface, pouvant avoir un effet nourrissant ou améliorant du sol. Ces matériaux n’ont toutefois pas toujours vocation à être enfouis et pourront être retirés en cours de culture.
Les inconvénients des paillages
Ils présentent quelques inconvénients réels, mais leurs avantages sont considérables tant pour le sol que le jardinier en diminuant sa charge de travail tout au long de la saison.
Réchauffement retardé de la terre au printemps
Germination entravée : un paillage de plus d’1 ou 2cm d’épaisseur empêchera la croissance de petites graines comme celles des carottes ou des navets.
Limaces & campagnols : les paillages attire la faune et donc aussi les limaces et les campagnols, qui y trouve refuge, gîte et couvert
Une mauvaise disposition du paillage au contact de la tige ou du collet, peut engendrer une entrée de bactéries pathogènes dans le végétal.
Les paillages au jardin - potager
La règle de base : utilisez ce qui est naturellement disponible dans votre jardin !
Vous arriverez ainsi à équilibrer naturellement les apports (plus azotés en été et carbonés en hiver)
Côté jardin
Pour les annuelles : 2 à 3 semaines après leur plantation, couvrez la terre avec un paillis de durée moyenne (tonte sèche, paillettes de graminée…)
Pour les massifs de vivaces : feuilles mortes broyées à la tondeuse, tailles de haies et brindilles broyées, paillettes de graminées… Disposez de la tonte sèche en grosse couche à renouveler régulièrement. N’enfouissez pas le paillis, mais ajoutez régulièrement une couche sur celle déjà en place.
Le cas particulier des plantes méditerranéennes et des aromatiques : ces végétaux risquent de souffrir de l’humidité conservée dans un paillage épais. Optez pour un paillage minéral à l’aide de pierres !
Pour les arbustes, les haies et les arbres isolés : paillis de longue durée d’origine forestière (feuilles mortes épaisses, branches broyées, écorces, tailles de haies broyées). Pour les fruitiers plus exigeants en humus et nutriments, alternez entre paillis azotés comme les tontes et paillis carbonés comme les branchages et les feuilles mortes.
Au potager
Choisissez le paillis en fonction de la durée de culture :
Pour les cultures courtes (navets, laitues, mâche, cerfeuil, épinards…) préférez un paillis qui se décomposera vite et qui sera préalablement haché pour que les petites graines puissent germer sans étouffer comme les feuilles de consoude ou d’orties. Ce type de matériau va rapidement se tasser. À renouveler au besoin!
Pour les culture de durée moyenne (entre 3 et 4 mois comme les pois, les pommes de terre…) choisissez les mêmes matériaux que pour les cultures courtes (sans hacher les feuilles cette fois), mais faites des couches plus épaisses. Vous pouvez aussi opter pour les fougères, les feuilles mortes ou du foin, toujours en grande quantité.
Pour les cultures longues et pérennes (choux, tomates, poireaux, artichauts…) utilisez feuilles mortes, broyât d’arbustes, fumier, paille, laine de mouton…
Le cas particulier des cultures denses réalisées à l’aide d’un semoir (carottes, radis…) : ces planches seront moins paillées pour que la graines puissent germer. Préférez un matériau fin type miscanthus, chanvre ou lin qui se dégradera rapidement et qui permettra aux jeunes pousses de lever en se frayant un chemin à travers les restes de paillages.
Paillez de préférence sur une terre humide après une bonne pluie ou un bon arrosage. Une fois installé, arrosez à l’aide d’un arrosoir sans la pomme de façon à ce que l’eau traverse la couche de paillis. Si vous en avez la possibilité, déroulez au préalable un tuyau microporeux ou un tuyau avec goutteur au pied des plantes avant de pailler.
Laissez-le en hiver et retirez les résidus au début du printemps, pour laisser au sol l’opportunité de se réchauffer pour la prochaine mise en culture. N’enfouissez pas le paillis en fin de culture, mais réutilisez-le ailleurs ! Ils serviront par exemple à recouvrir les allées entre les planches de culture pour éviter un tassement du sol trop important.
Sources :
Vivre avec la Terre - Tome 1 - Ferme du Bec Hellouin
L’encyclopédie Flammarion du potager et du jardin fruitier - Xavier Mathias & Denis Retournard